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Maximiser la valeur et la productivité

Depuis 2014, la scierie Lac-Saint-Jean a investi 10 millions de dollars pour transformer plus de bois tout en créant plus de valeur.

19 novembre, 2018  par Guillaume Roy


Le système de manipulation des billes en suspension d’Inotech permet de manipuler les billes sans les redresser, ce qui permet de produire des 3 x 3 sans courbure.

« Nos approvisionnements sont passés de 150 000 à près de 200 000 mètres cubes », remarque Manon Simard, directrice générale de la scierie Lac-Saint-Jean, avec une pointe de fierté. C’est grâce à l’ajout d’une petite ligne Inotech, montée avec des pièces d’une ligne Sawquip, que la scierie de Métabetchouan-Lac-à-la-Croix a réussi à atteindre un tel volume de transformation. Mais le chemin de croix a été long avant que le projet ne se concrétise.

Tout a commencé lorsque la scierie a fait l’acquisition d’une petite ligne Sawquip, en 2008… en plein cœur de la crise forestière. L’équipement a alors été entreposé en attendant que la tempête passe, car l’entreprise ne voulait pas faire d’investissements supplémentaires, notamment pour la réfection du bâtiment, dans cette période si difficile.

Pour s’en sortir, Scierie Lac-Saint-Jean s’est mise à exporter sur des marchés peu exploités au Québec, en envoyant son bois au Moyen-Orient, grâce à Almassa, un agent de mise en marché international basé à Montréal. « Pendant les années de crise, on a ajusté notre production pour livrer plus de bois vers l’Égypte ou l’Arabie Saoudite », note Manon Simard, qui exporte toujours près de 5 % de ses produits vers le Moyen-Orient.

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Il a fallu attendre à 2014 avant que le projet d’installation de la petite ligne ne refasse surface, lors de la renégociation des approvisionnements. En s’assurant un approvisionnement de base de 160 000 mètres cubes, et d’environ 35 000 mètres cubes de bois acquis aux enchères, l’entreprise a décidé de foncer, mais en optant pour une solution bonifiée, en travaillant avec Inotech, un partenaire de longue date, qui avait déjà remis la ligne principale à neuf par le passé.  

Cette fois-ci, Inotech s’est attaquée à l’installation d’une ligne de sciage de la série CCS, en utilisant les composantes retrouvées sur la ligne Sawquip, pour diminuer les coûts du projet. « Les composantes mécaniques de la ligne Sawquip étaient bonnes, mais le principe de sciage de répondait pas aux attentes de la scierie, explique Yves Lévesque, propriétaire d’Inotech. Notre système de manipulation en suspension permet de manipuler les billes sans les redresser, ce qui permet de produire des 2 x 2 ou des 3 x 3 sans courbure. »

Autrement dit, il faut éviter le sciage courbe pour faire des produits carrés, car le bois reprendra la courbature non acceptée par les clients pour ce type de produit. « Ça permet de scier les petites tiges sans induire de tension interne pour maximiser la qualité. », ajoute-t-il.

Classer les billes à l’extérieur
Il faut savoir qu’à la Scierie Lac-Saint-Jean, les billes sont classées par taille à l’extérieur en diamètres de 4, 6 et 8 pouces, souligne Manon Simard. Par la suite, le bois est transformé en lot, pendant quelques jours, avant de changer de diamètre à nouveau. « La grosse ligne fonctionnait environ 20 % du temps pour transformer les petites billes, ce qui n’était pas rentable », estime Yves Lévesque.

L’ajout de la petite ligne a ainsi permis de maximiser le rendement matière et la productivité, notamment grâce à une production accrue de 3 x 3, un produit dédié à la fabrication de palette, ajoute Mme Simard. Mis à part les produits de petite dimension, la scierie est spécialisée dans la production de 2 x 4, en plus de faire un peut de 2 x 6 et de la planche.

L’arrivée de nouveaux produits a nécessité l’ajout de deux bacs supplémentaires au classeur Inotech, installé au début des années 2000. Inotech a aussi profité de la réfection pour installer son système de trappes actionnées par ballons pneumatiques, note Yves Lévesque. « Ces sont deux petits ballons qui actionnent l’ouverture au lieu d’un cylindre ou d’un rotor pneumatique, ce qui réduit l’entretien, car les coussinets ne nécessitent aucune maintenance », dit-il.

Investir dans la finition
Près de 80 % du bois est vendu sec, et pendant plusieurs années, les activités de séchage et de rabotage étaient effectuées à forfait par d’autres entreprises de la région. « Depuis quelques années, on le faisait faire à l’extérieur, notamment à Québec. Pour créer de la valeur plus près de chez nous, on a décidé de faire l’acquisition de l’usine de rabotage d’Hébertville en 2016 », soutient la directrice générale.

Située à quelques dizaines de kilomètres de l’usine de sciage, l’usine de finition d’Hébertville a une capacité de 45 millions de pmp, depuis la modernisation effectuée par Scierie Lac-Saint-Jean.

D’abord, l’entreprise y a installé un système de classification de VAB Solutions, qui a permis d’« améliorer grandement classification et la possibilité de récupération », selon Manon Girard. Après avoir passé l’été à traiter beaucoup de sapin, qui représente environ 35 % de son approvisionnement (avec 65 % d’épinette noire), La Scierie LSJ s’activait maintenant à l’installation du système de classement MSR, également fournit par VAB Solutions, une acquisition qui permettra d’augmenter la valeur de certains produits de 5 à 10 %. « On pense pouvoir aller chercher une valeur ajoutée sur près de 50 % de la production. Ça va être intéressant surtout pendant les périodes plus difficiles, parce que tout est en demande quand les marchés vont bien », estime la gestionnaire qui a vu les prix chuter drastiquement au cours des derniers mois.

La scierie a aussi dû s’attaquer à la rénovation des séchoirs, après d’importants dégâts causés par un feu à peine cinq mois après l’achat. La bouilloire qui carburait aux planures a alors été remplacée par un système de séchoir à feu direct de Cathild fonctionnant au gaz naturel. Les séchoirs ont été remis à neuf en plus d’y ajouter un système de récupération de la chaleur. « Les opérations sont maintenant plus simples et on a baissé nos coûts d’opération », note Manon Simard.

Alors que la vente de bois brut est effectuée directement par Scierie Lac-Saint-Jean, l’entreprise régionale travaille avec des grossistes comme Bois du Fjord, qui écoule les produits principalement en Ontario et dans le reste du Canada.

En route vers le 4.0
Alors que la firme ASP a installé plusieurs systèmes d’automatisation, la scierie n’a jamais eu accès à autant de données. « On s’enligne pour acquérir encore plus de données pour prendre le virage 4.0, tout en raffinant nos méthodes de travail », soutient Manon Simard.

Après avoir investi une dizaine de millions de dollars depuis 4 ans, l’entreprise familiale, bâtie par Jean-Guy Simard, souhaite prendre son temps pour digérer les derniers investissements. N’empêche que le prochain investissement est déjà ciblé, car l’ajout de produits au rabotage nécessitera un de nouvelles cases et un meilleur système de classement, qui nécessite encore beaucoup de travail manuel.

Pour faire croitre les opérations, Scierie LSJ planche également sur l’idée de lancer un deuxième quart de travail. « Il faudrait développer une nouvelle stratégie pour trouver plus de bois et former nos gens », ajoute Manon Simard, qui souhaite y aller graduellement.

Dans ses deux usines, l’entreprise familiale lancée en 1980 emploie une soixantaine de personnes, et génère le même nombre d’emplois direct en forêt.

Créer plus de valeur avec les sous-produits
Il peut être difficile de créer davantage de valeur avec les sous-produits quand on est une scierie indépendante. C’est pourquoi plusieurs scieries du Lac-Saint-Jean, dont la Scierie Lac-Saint-Jean s’allie pour développer de nouveaux créneaux, grâce à l’Alliance Bois Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui a suscité l’intérêt d’un regroupement de transformateurs de la région pour accélérer le développement d’applications du biocharbon, en collaboration avec l’entreprise Biochar Boréalis.

Avec l’aide de Serdex International, un organisme régional de promotion de l’exportation, le regroupement vient de compléter une mission commerciale en France pour explorer le potentiel de production de laine de bois et du bois béton. Les visites en entreprises ont été si concluantes qu’un producteur de laine de bois envisage de s’implanter au Québec. « Alliance Bois SLSJ travaillera avec les entreprises pour la création et la gestion d’un projet structurant avec ce partenaire français, en plus de discuter avec les bonnes ressources pour s’assurer de maximiser cet investissement d’environ 25 millions d’Euros (40 millions de dollars canadiens) dans la région », précise Réal Bouchard, directeur général d’Alliance Bois SLSJ.

« On regarde tout ce qui est possible de faire pour diversifier nos marchés », a pour sa part mentionné Manon Simard, la directrice générale de Scierie LSJ, qui croit que la force du groupe peut les aider à créer davantage de valeur.


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